La Dolce Vita
La dolce vita, sorti initialement en France sous le titre La Douceur de vivre, est un film franco-italien de Federico Fellini, sorti en 1960. Ce film marque un tournant dans la filmographie de Federico Fellini. Il fait suite à trois films proches du néoréalisme : La strada (1954), Il bidone (1955) et Les Nuits de Cabiria (Le notti di Cabiria) (1957) et inaugure le vocabulaire cinématographique personnel qui deviendra définitivement la marque de fabrique « fellinienne » des films de la maturité.
La dolce vita est composé d'une série d'épisodes en apparence déconnectés. La structure du scénario n'est pas sans rappeler celle des films à sketches chers au cinéma italien et auxquels Fellini a lui-même eu recours plusieurs fois. Situé à Rome en 1959, le film suit, sur ce mode apparemment décousu, les pérégrinations de Marcello Rubini (Marcello Mastroianni), un jeune provincial aux aspirations littéraires devenu chroniqueur dans un journal à sensations.
La longueur du film empêche souvent d'en percevoir, à la première vision, le caractère extrêmement structuré. À travers des tableaux connectés par la présence de Marcello et de quelques autres personnages-clés (Pierotto, Paparazzo), Fellini explore systématiquement, en faisant appel à sa propre biographie, les choix existentiels qui s'offrent à un jeune homme doué : le mariage et la famille, la foi, les exigences de l'intellect, la facilité de l'hédonisme. Sans porter de jugement, le film évoque la face obscure et la face claire de chacun des parcours possibles, laissant finalement Marcello devant le choix de l'innocence ou de la déchéance.
La dolce vita - Wikipedia (français)
La dolce vita - Wikipedia (english)
" Le film "La Dolce Vita" est connu pour la dépravation qu'il exhibe, mais il est reconnu pour cette même dépravation qu'il peint et dont il montre l'inanité et la vanité. C'est là toute la subtilité d'un grand réalisateur comme Fellini : parvenir à montrer, à "faire voir" toute la décadence du monde du spectacle romain, avec ses vanités, ses imbécilités, ses mensonges, ses illusions, ses horreurs, ses vertiges, ses anciennes certitudes, ses nouvelles incertitudes, etc. sans avoir recourir à la parole ou à la dénonciation. Seul le regard de Marcello Rubini (Marcello Mastroianni dans l'un de ses plus beaux rôles) nous donne à voir, à faire l'expérience de ce monde à la fois illusoire (c'est un film et une histoire avec ses déformations) mais en même temps avec toute la réalité que ce monde d'illusions dissimule (cette réalité mondaine qui attire d'autant plus qu'elle existe avec toutes ses horreurs). Fellini réussit parfaitement ce qui était le grand thème de ce film : la frontière incertaine entre réalité du XXe siècle et illusion cinématographique, entre ce que le spectateur voit à l'écran et ce qu'il devine à propos des personnages (drogue, sexe débridé, alcoolisme débridé, mensonges, méchanceté, suicide, assassinat, etc.). Alors Marcello Rubini est ce personnage, cet "ange en enfer" qui explore ce monde vertigineux, tantôt cédant aux tentations de ce monde parce qu'il en fait lui-même partie, tantôt parvenant à s'extirper de celui-ci pour le regarder d'un œil sceptique. "La Dolce Vita", à travers l'œil de Rubini, est finalement un vertige, un rêve ... ou bien un cauchemar ... ; en tous les cas il constitue une œuvre à la fois marquante, subtile et humaine, voire humaniste."
" Sur les traces d'un chroniqueur de journal à grand tirage, Fellini met en scène un hallucinant enfer social. S'intéressant à un milieu social aisé, voir aristocratique, et utilisant un format scope et des acteurs célèbres, le film n'a, a priori, que peu de rapport avec le néoréalisme ("Le néoréalisme est-il vivant ou mort ?" est d'ailleurs la seule question à laquelle Sylvia refuse de répondre dans la séquence d'interview). Il correspond toutefois à la redéfinition du terme donné par Bazin en 1957:
Le néoréalisme c'est la primauté donnée à la représentation de la réalité sur les structures dramatiques. La réalité n'est pas corrigée en fonction de la psychologie et des exigences du drame, elle est toujours proposée comme une découverte singulière, une révélation quasi documentaire conservant son poids de pittoresque et de détails. L'art du metteur en scène réside alors dans son adresse à faire surgir le sens de cet événement, du moins celui qu'il lui prête, sans pour autant effacer ses ambiguïtés.
Or Bazin a repéré chez Fellini la volonté de s'écarter de la morale petite-bourgeoise, qui tend toujours à juger les personnages, pour suivre son inspiration franciscaine qui le conduit à faire, de manière beaucoup plus radicale, de l'ange la mesure ultime de l'être. L'enjeu de La dolce vita est rien moins que de voir comment l'homme quotidien et contemporain s'arrange avec le spirituel.
Fellini a ainsi accumulé différentes incarnations du spirituel dans un monde apparemment trivial. Il étudie alors comment son personnage principal, Marcello, réagit aux signes de la grâce.
Le suivie de la statue du Christ en hélicoptère survolant l'EUR, ce quartier rectiligne, monumental, "buzzatien", un héritage du fascisme situé au sud de Rome, n'est l'objet d'aucune révélation et n'est qu'une occasion de demander leur numéro de téléphone aux jeunes femmes prenant le soleil sur les terrasses des immeubles. Dans une interview recueillie par le cinéaste Luciano Ulmer pour la RAI, Fellini dit sa fascination pour ce quartier où a aussi été tourné l'épisode du Bocacce 70 : "Il y a quelque chose de métaphysique dans ce quartier, explique Federico, quelque chose de Chirico, mais aussi une légèreté, comme habiter dans un tableau ! C'est un espace de liberté. Au fond c'est comme un studio de cinéma."
L'amour ne peut se faire que chez une prostituée ou devient une caricature d'égoïsme. Sylvia peut bien se baigner sous le patronage protecteur de Neptune dans les fontaines de Trevi, celles-ci cessent de fonctionner dès que Marcello veut l'idéaliser comme une déesse. La soirée factice que le danseur-gigolo à l'allure dionysiaque essaie de dynamiter ne fait qu'écarter Marcello de Sylvia.
La religion se transforme en foire aux miracles. Les espoirs déçus de chacun se terminant par des reliques sauvages et dérisoires arrachées à un arbuste et la mort d'un handicapé.
Le charme de chacune des longues séquences du film réside ainsi dans la posture distinguée et élégante du héros qui ne peut que se refuser à des engagements terrestres qui l'attirent mais dont il perçoit l'insuffisance. Le monstre marin, pêché par les hommes, est le symbole trop évident de la corruption et de la monstruosité terrestre. Le signe de la grâce, Marcello aurait pu le trouver avec la jeune fille au visage d'ange ombrien qui lui avait conseillé la joie simple et l'écriture, mais dans la dernière séquence, il ne la reconnaît pas. Elle ne peut qu'adresser au spectateur un dernier sourire avant que le film ne se termine.
Au final pourtant la recherche de Marcello vaut mieux que le retrait du monde dans lequel s'est enfermé Steiner, l'intellectuel. Celui-ci, athée, autodidacte, cultivé, riche d'amitié et d'amour ne vit que dans le monde clos de l'église et de son appartement. Les rayons de lumière qui éclairent l'extérieur de son appartement sont d'ailleurs sans doute les signes d'un univers carcéral, motif qui sera repris plus tard par Fellini dans Ginger et Fred" .
Jean-Luc Lacuve le 20/03/2002
Des jeunes femmes en maillot de bain regardent arriver dans le ciel une statue du Christ, suspendue à un hélicoptère. « C'est Jésus ! » s'écrient-elles, pendant qu'un journaliste embarqué dans l'hélico les reluque. Dès cette scène d'ouverture, un souffle de folie s'engouffre dans La Dolce Vita. Tout se mélange, les bikinis et le sacré, les cafés de la via Venetto et les églises de Rome, les palaces et les lieux sordides. On vole, on roule en décapotable, on va partout avec le journaliste Marcello (joué par Mastroianni), qui court après les scoops. Les médias, les moeurs, tout s'affole, c'est le show permanent, l'amour et l'orgie.
Cette fresque, devenue monument de l'histoire du cinéma, fit scandale à sa sortie, tout en récoltant sans attendre une Palme d'or à Cannes, en 1960. Le génie de Fellini, c'est de réussir à saisir l'énergie de l'époque, d'en donner la démesure, mais aussi d'en dire, déjà, l'épuisement. Le mouvement qui conduit sans cesse d'un lieu à l'autre débouche sur l'immobilisme. La frénésie sur le vide. Cette dolce vita pleine d'apparitions magiques (comme celle, fameuse, d'Anita Ekberg dans la fontaine de Trevi) est finalement saturée de fantômes. L'explosion de modernité culmine en mélancolie presque mortifère. Un film de visionnaire lucide, unique en son genre.
Frédéric Strauss
La fontaine de Trevi (fontana di Trevi) est un monument du XVIIIe siècle, un des sites touristiques les plus célèbres de Rome. Elle est adossée au Palais Poli.
Commandée à Niccolò Salvi en 1732 par le pape Clément XII Corsini pour remplacer le modeste bassin installé à cet endroit par Nicolas V, la fontaine de Trevi fut achevée trente ans plus tard en 1762 par Niccolo Pannini. Adossée au palazzo Poli, cette œuvre monumentale en forme d'arc de triomphe, écrase la minuscule place sur laquelle elle se trouve.
L’origine de son nom peut être légendaire ; d'aucuns affirment qu’elle fut nommée Trevi à cause des bas-reliefs de la fontaine, en référence à la légende selon laquelle une dénommée « Trevi » aurait sauvé sa virginité en indiquant l’emplacement de cette source. Mais l'étymologie la plus acceptée, moins poétique mais plus probable est latine : trivium (tre vie en italien), signifiant « trois rues », et Trevi est justement le nom du rione (secteur administratif, dans plusieurs villes italiennes) où trône cette fontaine monumentale, rendez-vous par excellence des amoureux et des couples désirant un enfant.