Natalie Wood - Bio et photos 2
" De son vrai nom Natalia Nikolaevna Zakharenko (lequel fut modifié en Gurdin), Natalie naît au cœur de l'été 1938 à San Francisco, Californie, dans une famille d'immigrés russes. Nikolaï, le papa, se débrouille tant bien que mal en accomplissant de petits travaux tandis que Maria, la maman s'occupe du foyer familial.
En 1946 apparaît une petite sœur, Svetlana, qui fera un peu de cinéma sous le nom de Lana Wood. Natalie avait également une demi-sœur, Olga, son aînée de dix ans, issue du premier mariage de sa mère. Ambitieuse, cette dernière était persuadée que Natalia possédait des dons d'actrice suffisants pour justifier un rapprochement d'Hollywood, de ses paillettes… et de ses moguls tout-puissants ! Obstinée, elle parvient à forcer les portes de la 20th Century Fox et à imposer son enfant.
Cette dernière a cinq ans lorsque Irving Pichel lui offre sa première apparition à l'écran. Dans «Happy Land» (1943), elle incarne une petite fille qui laisse tomber son cornet d’ice cream, comédie gentillette rondement menée par Don Ameche et Frances Dee. Emballé par l'éveil et l'espièglerie de sa jeune interprète, Pichel la rappelle pour «The Moon is Down» (1943), une adaptation du roman de John Steinbeck dont la tête d’affiche est Sir Cedric Hardwicke.
Confiant, Darryl Zanuck, le patron du studio, la prend sous contrat, lui ouvre les portes de son école et lui permet de retrouver Pichel pour «Demain viendra toujours» (1945), en fille de Claudette Colbert et du supposé défunt Orson Welles.
Deux ans s’écoulent sans que les studios ne l’oublient, loin de là. Ainsi, dans «Le miracle de la 34ème rue» (1946), son premier rôle sous le pseudonyme de Natalie Wood, elle interprète la petite fille de Maureen O'Hara, tout à la fois incrédule et espiègle, face au Père Noël auquel Edmund Gwenn n'a aucune peine à prêter ses traits naturellement paternels.
Parfaite, coquine, confondante de spontanéité, elle se retrouve par la suite immanquablement "la fille de" :… Robert Cummings et de Barbara Stanwyck pour «Amazone moderne» (1946);… Gene Tierney, jeune veuve amoureuse d'un fantôme, dans le très beau mélodrame «L’aventure de Madame Muir» (1947) de Joseph L. Mankiewicz;… Bette Davis dans «La star» (1952), actrice déchue devant laquelle elle est pétrifiée d'admiration.
Signalons aussi «La flamme qui s’éteint» (1949), un mélodrame de Rudolf Mate à faire embuer les yeux sensibles, dans un rôle qu'elle défend très bien auprès de sa nouvelle maman, Margaret Sullavan.
La filmographie de cette décade heureuse jusqu'à son adolescence s'enrichit d'autres partenaires de renom : Rex Harrison, Dan Dailey, Ann Blyth, James Stewart à deux reprises, Charles Laughton, Jane Wyman, Irene Dunne, Bing Crosby, etc.
La fureur de vivre …
En 1955, Natalie a dix-sept ans. L’adolescente sort de sa chrysalide et sacrifie ses nattes. Elle est divinement jolie. La Warner Bros la repère. David Weisbart, l'un de ses plus jeunes producteurs, et le réalisateur Nicholas Ray préparent dans l'effervescence «La fureur de vivre» (1955). James Dean, un jeune comédien myope sorti de l’Actors Studio de Lee Strasberg et vivement recommandé par Elia Kazan, est en tête d'affiche. Natalie sera sa petite amie, fraîche et affranchie, entourée aussi de Sal Mineo et de Dennis Hopper, lequel disputera au metteur en scène, hors caméra, les faveurs de la jeune actrice. Ce film, devenu culte, relate le drame d'adolescents ayant à surmonter chacun leur crise familiale. Natalie se voit décernée le Golden Globe et une première nomination à l'Oscar du second rôle, mais la statuette lui échappera au profit de Jo Van Fleet, vedette de «A l'est d'Eden / East of Eden» aux côtés de ... James Dean !
La Warner Bros propose à notre vedette le rôle d'une enfant kidnappée par de méchants Comanches qui, après avoir tué ses parents et incendié le ranch familial, en font la squaw de leur chef. «La prisonnière du désert» (1956), l'un des meilleurs westerns de John Ford, demeure l'un des plus grands de l'histoire hollywoodienne. Les valeureux John Wayne et Jeffrey Hunter, partis à la recherche de la jeune fille, nous permettent d'admirer des horizons crépusculaires et de traverser les mers de rochers désertiques de la célébrissime et lunaire Monument Valley.
Raoul Walsh, qui prépare «L'esclave libre» (1957), la souhaite comme partenaire d'un Clark Gable prêt à incarner un Rhett Butler vieillissant. Natalie est emballée, mais la Warner lui préfère Yvonne de Carlo. Le studio pense dédommager sa jeune vedette avec «Bombardier B-52» (1957) de Gordon Douglas, hymne à la gloire du célèbre appareil, mais dont l'audience restera bien en deçà du succès rencontré par le film de Walsh.
Telle une teenager amoureuse, la belle enfant succombe au charme du comédien Robert J. Wagner, familièrement appelé R.J., rencontré sur les plateaux des studios. Il a 30 ans, près de 20 films à son actif, elle un peu plus; tous les deux se prévalent d'une filmographie bien représentative, de succès mérités et d'une cote "bankable", pour utiliser un langage actuel. Leur union sera célébrée le 28 décembre 1957 à Scootdale, Arizona. Mais hélas, leurs carrières respectives les absorbent et l’entente ne tardera pas à se fragiliser…
Vient «Les diables au soleil » (1958), où Natalie incarne une jeune métisse source d'un problème raciste entre deux soldats épris d'elle, deux soupirants au charme dévastateur, d'autant plus qu'ils ont les traits de Frank Sinatra et Tony Curtis.
Sa carrière se poursuit avec des hauts et des bas, des films qu'elle n'apprécie pas toujours et des rôles dont elle doute de plus en plus. Elle refuse certains tournages, générant d'irrémédiables situations conflictuelles avec les producteurs. Fragile, elle traverse alors de fortes dépressions qui la conduisent aux cabinets des plus célèbres psychanalystes. Sa vie sentimentale secouée par de multiples liaisons – souvent avec ses partenaires de plateaux – se lézarde et le divorce, inéluctable, est prononcé le 27 avril 1962.
Une Juliette pas comme les autres…
Qui ne connaît «West Side Story» (1961) ? Cette comédie musicale émouvante et envoûtante, transposition moderne de l'histoire de Roméo/Tony et de Juliette/Maria (Richard Beymer et Natalie Wood) illustre la confrontation des "Jets" (les blousons noirs) et des "Sharks" (les Portoricains émigrés à New York) enflammée par les chorégraphies explosives de Jerome Robbins et la musique inspirée de Leonard Bernstein. Ce chef d'œuvre musical détient un record toujours inégalé : 10 oscars attribués et une nomination non transformée… pour Natalie dont ce sera la grande déception professionnelle. Mince compensation : pour son 23ème anniversaire, selon le rituel accordé aux stars, elle immortalisera ses empreintes dans le ciment de la "Walk of Fame" face au Grauman's Chinese Theater d'Hollywood.
Avec «La fièvre dans le sang» (1961), Elia Kazan relate une tragédie survenue dans une bourgade du Kansas à la fin des années 20. Victime des interdits moraux de l'époque, l'amour qui unit les deux adolescents (Natalie Wood et Warren Beatty) s'écroule et l'émouvante héroïne sombre dans la folie. La composition de l'actrice lui vaut une nouvelle nomination, pas plus heureuse que la précédente. Invitée au Festival de Cannes, elle y apparaît malgré toute radieuse au bras de son partenaire, ébauche d'une idylle chaotique trahie par de nombreuses infidélités réciproques.
«Une certaine rencontre» (1963) retrace celle naissant entre une petite vendeuse et un musicien new-yorkais (Steve McQueen) dont elle tombe enceinte. Sa brillante interprétation lui vaut sa troisième nomination pour la course à la statuette… dont elle sort une fois de plus bredouille. Consolatrice, l'Argentine lui décerne le grand prix de la meilleure actrice au Festival de Mar del Plata.
Autre très belle composition que celle donnée dans «Daisy Clover, la jeune rebelle» (1965) aux côtés de Robert Redford, histoire d’une lente et dure ascension d'une jeune chanteuse de music-hall, marionnette entre les mains d'un producteur tyrannique. Certains critiques n'hésitent pas à lui tresser de nouveaux lauriers, trouvant même qu'il s'agit de son plus grand rôle à l'écran. Sans doute plus exigeant, le public européen ne lui accorda qu'une faible audience.
Dès le film suivant, «Propriété interdite» (1965) de Sydney Pollack, elle retrouve Robert Redford - à qui la lie une profonde et sincère amitié - pour incarner une émouvante fille de taulière aguicheuse, désirée, voire achetée, évoluant dans l'univers glauque et poisseux d'une petite ville de la Louisiane comme aime les dépeindre Tennessee Williams.
Enfin, en 1969, en pleine période beatniks, «Bob and Carol and Ted and Alice» de Paul Mazursky peut se percevoir comme une satire érotico-vaudevillesque ou un marivaudage hollywoodien prônant une émancipation sexuelle inattendue chez des Américains qui, à l’époque, s’affichaient encore très pusillanimes. Ce film au sujet “prometteur” sera son dernier à connaître un grand succès public.
La baie du destin …
Bien qu'elle gérât ses rôles, Natalie Wood commit les erreurs de refuser ceux qu'elle ne “sentait” pas ou d'accorder la priorité à sa vie familiale. Faye Dunaway profita ainsi de deux superbes opportunités : «Bonnie and Clyde» (1966) et «La tour infernale» (1974). Recalée à trois reprises aux oscars, elle reçut de la presse étrangère Le Lampoon Adward 1966 attribué à l'actrice… la plus mauvaise de l'année ! Non dépourvue d'humour, elle accepta la récompense sans la moindre aigreur.
Le 30 mai 1969, après sept années de célibat qui ne furent pas pour autant solitaires, elle convole avec le producteur anglais Richard Gregson. Deux années plus tard, le divorce prononcé à la veille de son 34ème anniversaire, elle rejoint les bras de son Prince Valiant / R.J. Rassemblés une seconde fois, ils protégeront désormais leurs retrouvailles dans leur villa de Beverly Hills. Natalie donna une fille à chacun de ses époux : respectivement Natasha Gregson (septembre 1970, aujourd'hui actrice sous le pseudonyme de Natasha Gregson Wagner), et Courtney Brooke (mars 1974).
Dès ses 16 ans, elle fut présente sur les écrans de télévision, notamment pour plusieurs épisodes de «The Pride of the Family» (1954), une comédie familiale style "soap opera" bien sage, pour laquelle elle incarne une adolescente mutine et délurée. Par la suite, elle eut des rôles nettement plus importants : «The Affair» (1973) qu'elle tourna en Pennsylvanie auprès de Robert Wagner au lendemain de leur remariage; «La chatte sur un toit brûlant» (1976) dans le rôle que tenait Elizabeth Taylor à l'écran ; «Tant qu'il y aura des hommes» (1979), reprenant le personnage de l'épouse délaissée et bafouée que personnifia si bien Deborah Kerr et qui lui valut un second Golden Globe ; «The Memory of Eva Ryker/Les diamants de l'oubli» (1980), son tout dernier téléfilm aux côtés de Jean-Pierre Aumont et de Mel Ferrer.
Au lendemain du Thanksgiving, le 29 novembre 1981, c’est le drame. Un flash apparaît sur toutes les chaînes de télévision. Dans l'incrédulité la plus totale, nous apprenons le décès de Natalie Wood, noyée nuitamment au large des côtes californiennes, non loin de Santa Catalina Island. Cette mort très controversée sera officiellement déclarée accidentelle. Avec Robert Wagner, Christopher Walken, son partenaire de «Brainstorm» (1981) en cours de tournage, et Dennis Davern, le skipper de leur yacht le "Splendor", ils auraient bu plus que de raison, au point qu'une rivalité se serait déclarée entre Wagner et Walken. Natalie les aurait quittés et rejoint sa chambre mais, réveillée par le bruit du canot cognant bruyamment le yacht, se serait levée pour mieux l'attacher. Elle aurait perdu l'équilibre, aurait glissé et serait tombée à la mer.
Pourtant, l'autopsie du corps, retrouvé le lendemain matin, révèle des marques suspectes et les interrogatoires des contradictions. Les résultats d'une enquête que l'on dira bâclée donnera libre cours à bien d'autres supputations. Nonobstant, le très sérieux "Time Magazine" conclura : "It was not a homicide, not a suicide. It was an accident ( Ce n'était pas un crime, ce n'était pas un suicide, c'était un accident)". Le verdict officiel se prononcera dans le même sens. Mais, depuis le printemps 2010, Lana Wood a déposé au bureau du shérif du comté de Los Angeles une demande pour rouvrir le dossier. Affaire à suivre, donc…
«Le prix de la gloire» …
Sorti deux ans plus tard, «Brainstorm» ne rencontrera qu'un succès mitigé. Natalie devait tourner encore quelques scènes pour lesquelles elle fut remplacée par une doublure filmée de dos. À la fin du générique, la MGM saluera l'ensemble de sa carrière par une brève dédicace. Cet hommage bien mérité aurait été mieux valorisé par un film nettement plus représentatif, une histoire et une réalisation sensiblement moins absconses.
En 2004, la Cypress Point Productions produit un téléfilm en deux parties, «The Mystery of Natalie Wood/Natalie le prix de la gloire», réalisé par Peter Bogdanovitch et interprété par Justine Waddell.
Le 2 décembre 1981, les obsèques de l'actrice amenèrent de nombreuses personnalités du monde artistique au paradis des stars, le Westwood Memorial Cemetery de Los Angeles, où reposaient déjà Marilyn Monroe, Dean Martin, Burt Lancaster et Cornel Wilde,…. On pouvait notamment reconnaître, suivant le cercueil recouvert de gardénias (ses fleurs préférées) et accompagnant Robert Wagner : Frank Sinatra, Jack Lemmon, Rock Hudson, Gregory Peck, David Niven, Fred Astaire, Sir Laurence Olivier, Elizabeth Taylor et Christopher Walken. Aujourd'hui, il reste une tombe toute simple surmontée de la croix orthodoxe russe et gravée de l'épitaphe de circonstance.
Outre ses films, que retenir de cette enfant prodigue, de cette jeune actrice, mais aussi de cette maman, qui nous quitta aussi tragiquement par cette nuit sombre et froide de novembre, dans une baie voisine de l'endroit où, neuf ans plus tôt, elle avait “re-épousé” Robert Wagner ?
Elle avait 43 ans et un long chemin encore à parcourir, des opportunités sans doute à nous séduire et nous émouvoir. Elle ne put nous offrir ces cadeaux. Nous aurions souhaité qu'elle soit encore parmi nous, plus belle, plus incandescente que jamais.
Elle avait des yeux de biche, des yeux marron, source d'un regard lumineux.
Elle était très jolie et elle le savait.
Elle s’appelait Natalie …"
Yvan Foucart (février 2011)
L'ENCINEMATHEQUE
Encyclopédie du cinéma des origines à nos jours